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VERSATILE

11 mars 2007

Samaria

Yeo-jin, une adolescente, vit seule avec son père veuf, un policier. Quand elle n'est pas à l'école, elle aide sa meilleure amie, Jae-young, qui se prostitue, à gérer sa clientèle. Le but étant pour les deux jeunes filles de réunir assez d'argent pour pouvoir s'offrir un voyage en Europe. Mais Jae-young s'attache facilement aux hommes qu'elle rencontre, ce qui ne semble pas plaire du tout à Yeo-jin. Un jour, Jae-young et un de ses clients sont surpris par la police dans un hôtel de passe. Plutôt que de se faire arrêter, Jae-young saute par la fenêtre et se blesse gravement.

Samaria est un film qui  au premier abord peut déconcerter car il introduit des ruptures de ton, des changements de point de vue inattendus dans la narration qui peuvent donner le sentiment  que le film est décousu, alors qu'il obéit au contraire à une stricte logique mise en place par le réalisateur.

La première partie pourrait s'apparenter à une chronique de la prostitution adolescente en Corée avec une variante essentielle : Jae-Young, qui se prostitue, semble y prendre beaucoup de plaisir, se lie facilement avec les clients que lui rabat son amie yeo-Jin, entre dans leurs vie personnelles pour mieux les connaître. Ce petit commerce est décrit avec une forme d'innocence, d'insouciance qui permettent au film d'échapper au pensum. En outre, Kim Ki Duk pose un regard sur les adolescente qui adopte une juste distance, jamais voyeuriste ou sordide.

La seconde partie, qui suit la mort de Jae-Young, oriente le film vers le thème de la rédemption : Yeo-Jin, qui éprouve un fort sentiment de culpabilité pour avoir été celle qui gérait la clientèle de son amie, va retrouver tous ses anciens clients pour se prostituer à son tour et leur rendre leur argent. On entre ici davantage dans la description des relations entre la prostituée et ses clients. Yeo-Jin va comprendre le plaisir que ressentait son amie au contact de ses clients. Ceux-ci ne sont en effet pas présentés comme des monstres pédophiles, mais des hommes ordinaires, parfois bons, sur lesquels on porte un  regard non pas d'accusation ou de jugement, mais dont on comprend presque les motivations qui les poussent à payer pour faire l'amour.

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Le film opère une nouvelle rupture avec la découverte par la police d'un corps assassiné dont on croit spontannément qu'il s'agit de celui de Yeo-Jin alors qu'il s'agit de celui d'une autre prostituée. « Samaria » adopte alors le point de vue du père de Yeo-Jin, qui découvre le commerce de sa fille et qui va s'employer à poursuivre  ses clients pour les dissuader de payer ses services. C'est ici manifestement le point de vue moral qui s'impose au travers de la détresse du père. Celui-ci agit en dehors de sa fonction de policier  en tant que simple citoyen : il va jusqu'à s'immiscer dans la famille d'un des clients de Yeo-Jin pour l'accuser devant femme et enfants et le pousser au suicide, ou à commettre un meurtre pour libérer sa fille de ce fléau. On entre alors dans la condamnation sociale de la prostitution adolescente, sans plus qu'aucune compréhension ou compassion ne se manifeste. C'est la justice aveugle qui s'abat au nom de la société. On le comprend, Kim Ki Duk opère les ruptures dans le récit avec des scènes traumatiques, qui brisent le confort du spectateur et la prévisibilité des événements : le saut dans le vide de Jae-Young, la découverte de la prostituée assassinée, le meurtre à main nu d'un client de Yeo-Jin.

La dernière partie du film organise la réconciliation du père et de sa fille lors d'une randonnée à la campagne, sur la tombe de la mère décédée. Nous sommes ici dans le rite d'initiation, dans le récit d'apprentissage, le retour à la tradition et aux valeurs. Les gestes rituels sur la tombe de la mère ressèrent les liens père-fille, les péchés de chacun sont lavés et il est temps pour Yeo-jin de voler de ses propres ailes.

Samaria est donc bien une oeuvre hétéroclite, qui use de symboles pour mieux signifier son propos, mais qui demande au spectateur un effort de synthèse indispensable pour en appréhender la richesse et l'intelligence.

Le dvd

Publié dans une édition "budget" à moins de 15 euros dans un boitier "slimpack", Samaria dispose de caractéristiques techniques tout juste correctes, et n'offre comme supplément qu'un court making of qui témoigne des méthodes de tournage de Kim Ki Duk, et donne la parole aux jeunes actrices.

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10 mars 2007

Studio 60 on the Sunset Strip - S01E01

Studio 60 on the Sunset Strip était l’un des événements majeurs de la rentrée télé US pour deux raisons essentielles : le retour de Mathew Perry dans une série après la fin définitive de Friends et celui de Aaron Sorkin, suite à la dernière saison de The West Wing.

Tous les fidèles de la série décrivant les différentes législatures du président Bartlett et de son staff considèrent généralement « West Wing » (« A la maison blanche ») comme un  chef d’œuvre d’écriture télévisuelle, un mécanisme de précision reposant sur la qualité des dialogues et des situations. Pour faire simple, le texte de Sorkin, dans la bouche de ses comédiens , c’est du véritable caviar que l’on déguste sans modération. Mathew Pery avait d’ailleurs interprété un petit rôle dans quelques épisodes des saisons 4 et 5 de West Wing, il rejoint naturellement le nouveau projet de Sorkin.

Studio Sixty on the Sunset Strip (déjà, ce titre !) nous plonge dans les coulisses d’une émission éponyme, sorte de Saturday Night Live en perte de vitesse que son producteur executif, Wes Mandell, décide de saborder un soir de direct suite à la censure d’un sketch. Jordan McDeere, nouvelle directrice des programmes de la chaîne décide alors de rappeler au secours du programme le duo de scénaristes remercié plusieurs années auparavant : Matt Albie (Matthew Perry) et Danny Tripp (Bradley Whitford, qui interprétait Josh Leeman dans West WIng).


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On voit bien dès le départ ce qui pouvait intéresser Aaron Sorkin dans cette description sans concession du microcosme télévisuel : mettre une nouvelle fois en scène la coulisse, montrer une équipe au travail, analyser les relations, les luttes de pouvoirs. Dès le premier plan du show, on retrouve sa patte inimitable à la faveur de ces longs plans séquences où des personnages en action (physique bien sûr mais souvent aussi verbale) traversent un décor, en explorent le moindre recoin suivi de près par la caméra. C’était le dispositif principal de The West Wing, Aaron Sorkin  inaugure son nouveau bébé par un plan identique, afin de prendre le spectateur par la main. Il pousse l’auto-dérison jusqu’à mettre en scène un sketch se déroulant dans le bureau oval avec un président grotesque et lamentable. Une drôle de mise en abîme qui nous indique que Sorkin ne se prend pas toujours au sérieux et que le ton de Studio 60 sera davantage porté sur la comédie que The West Wing. Cela ne veut pas dire qu’il a choisi d’abandonner la rigueur d’écriture qui le caractérise, cette petite musique des mots qui chante à nos oreilles. Non, le premier épisode de Studio 60 témoigne toujours d’un souci invariable de convoquer la réplique juste, en toutes circonstances.

Le glissement semble donc se faire naturellement des couloirs de la Maison blanche aux studios d’une émission de télé, Sorkin ne manifeste aucune condescendance envers ses nouveaux personnages.  On pouvait craindre que passer d’une leçon de démocratie à l’observation du milieu des médias aurait pu le rendre hautain ou supérieur, il n’en est rien, si certains portraits de patrons de chaînes se font au vitriol, c’est toujours en évitant la caricature dans laquelle aurait pu tomber un tel projet.

On attend donc la suite avec impatience, en espérant que les mauvais scores d’audience enregistrés par la série ne remettent pas en cause sa pérennité à long terme.

10 mars 2007

Prison Break - S02E01

Autant le dire tout net : la saison 1 de Prison Break avait déçu. Malgré son argument excitant d’ « escape movie » qui laissait augurer d’un habile croisement entre « 24 heures chronos » et « Oz », la série échouait très vite à convaincre, la faute à deux écueils absolument rédhibitoires. Un scénario dont les ficelles frisent régulièrement le grotesque en toutes circonstances : qu’il s’agisse des invraisemblances dans le plan d’évasion ou des clichés convenus concernant le complot politique qui se trame à l’extérieur,  il est impossible de prendre au sérieux une série dont les faiblesses d’écritures sont aussi manifestes. Deuxième inconvénient majeur : l’interprétation, très loin d’être au niveau d’une série événementielle. Que ce soit Wentworth Miller dans le rôle de Michael Scoffield, qui affiche en permanence la même expression de beau ténébreux, à Dominic Purcell, son frère Lincoln qui ne parvient jamais à donner vie à son rôle, en passant par Robin Tunney, pas crédible pour un rond dans le rôle de Véronica, avocate dont elle échoue à apporter le côté acariâtre qu’exigeait un tel personnage, le casting principal est une erreur sur toute la ligne. Heureusement rattrapé par les seconds rôles, Sucre, T Bag, John Abruzzi ou C Note, qui compensent une direction d’acteur aléatoire. Malgré cela, il faut bien l’avouer, le show réussissait souvent à remplir son contrat addictif, mais au prix d’insuffisances qui interdisent de considérer « Prison break » comme une grande série, à contrario d’un « 24 heures chronos », la série dont elle est la plus proche dans sa gestion du temps et rebondissements.


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La fin de la première saison se terminait sur un cliffhanger frustrant pour le téléspectateur, et promettait une orientation nouvelle du récit. « Breaking was only the beginning » annonce la deuxième saison. Franchir les murs de Fox River n’était que la première épreuve des évadés qui doivent maintenant échapper à une horde de poursuivants lâchés à leurs trousses. Cette nouvelle direction promettait encore que du bon, à ce point que nous étions presque disposés à tirer une croix sur tout ce qui faisait échec dans les 22 premiers épisodes. Le premier épisode de cette saison 2 enterre très vite notre enthousiasme et nos maigres espoirs. Prison Break retombe rapidement dans tous les travers déjà constatés précédemment, à savoir un scénario qui redevient prévisible dans la propension qu’il a de tuer dans l’œuf toutes les possibilités de suspens offertes par l’intrigue, et qui ruine d’entrée les quelques idées audacieuses  qui ne resterons qu’à l’état de promesse. Ainsi, la possibilité d’avoir dehors les évadés de Fox River et enfermée dans une demeure dont elle ne peut pas s’échapper l’avocate Véronica était un retournement de situation dont auraient pu se jouer les scénaristes, mais qu’ils  anéantissent à la faveur d’un rebondissement interdisant cette option. Tant pis. De même, l’intérêt d’un nouveau personnage, l’agent du FBI Malone, qui pouvait laisser augurer d’un jeu du chat et de la souris passionnant avec Michael Scoffield, est immédiatement disqualifié par leurs dispositions respectives à anticiper les réactions de l’autre, sans que tout cela ne nous surprenne au final. Ainsi, l’agent Malone déchiffre dès le premier épisode le secret du tatouage de Michael Scoffield et ce dernier parvient déjà à régler les problèmes de logistiques rencontrés par les évadés, qu’il avait  anticipés dès le début, bien évidemment.

Prison Break risque donc de continuer sa route sur les bases instaurées dans la première saison. On espérait de tout cœur une nouvelle série, on n’a finalement que la même chose, pas déplaisant en soi, mais trop pétri de scories pour convaincre réellement.

10 mars 2007

Masters of Horror - Saison 1

podcast_soundtrackProduit par le network américain Showtime sous la houlette de Mick Garris, Masters Of Horror est l'un des projets télés les plus excitants de ces derniers mois car il convoque pour une anthologie de 13 épisodes les plus grands réalisateurs du cinéma d'horreur, de Tobe Hooper à John Carpenter en passant par Dario Argento et Stuart Gordon. Sur un strict cahier des charges en terme de budget et de conditions de tournage, cette série est la manifestation d'une inventivité et d'une franche émulation au sein de cette réunion de grands maîtres du genre, dont certains nous livrent ici ce qu'ils  ont produit de mieux depuis des lustres.

Réalisé par Don Coscarelli (Bubba Ho Tep), « Incident in and off a mountain road » ne démarre cependant pas la série sous les meilleurs auspices. Il s'agit d'un survival classique où une jeune femme, suite à un accident de voiture en pleine campagne, est poursuivie par un tueur patibulaire, le « Moon Face ». L'originalité de ce film est que la victime, mariée à un adepte  de l'auto défense, va mettre en oeuvre les conseils prodigués par son mari pour échapper à son poursuivant. Le film est construit en un montage alterné entre le jeu de chat et de la souris entre la jeune femme et le Moon Face, et les flash backs revenant sur la dégradation progressive de sa vie de couple antérieure due à l'obsession de son mari pour les techniques de combat, le maniement des armes blanches et le tir. On a cependant du mal à croire aux ruses (façon Mike Guyver) qu'emploie la jeune femme pour échapper à son poursuivant, celle-ci bricolant des pièges assez improbables alors qu'elle a à ses trousses un dangereux psychopathe. Le film trouve heureusement son second souffle lorsqu'on rentre dans le repaire du Moon Face où celui-ci y pratique la torture façon « énucléation » et où y est enfermé une de ses anciennes victimes encore vivante, Bruce. On pense alors aux repères des serial killers les plus célèbres, du Leather Face de Massacre à la Tronçonneuse à la famille de frapadingues de House of 10,000 Corpses. Le film se conclue sur un twist où on découvre que de victime à bourreau, la jeune femme avait déjà résolu ses problèmes de couple de façon radicale.

Avec « Dreams in the witch house », Stuart Gordon adapte une nouvelle fois HP Lovecraft après notamment Re Animator. Le film se déroule dans un hôtel miteux où Walter, un jeune étudiant révisant ses examens loue une chambre à côté de celle d'une mère isolée avec son fils, Danny. Très vite, il est sujet à d'étranges hallucinations pendant son sommeil. Le film obéit à une stricte unité de lieux puisqu'il se déroule presque exclusivement dans le décor d'une chambre de bonne. Stuart Gordon y organise la lente descente dans la folie de son personnage principal qui doute de plus en plus de sa santé mentale suite à des visions tantôt érotiques, tantôt grotesques (le rat à face d'homme!) et la découverte du passage d'un monde à un autre. C'est une lutte contre la folie à laquelle nous assistons, le jeu halluciné du personnage principal nous rappelle d'ailleurs celui de Bruce Campbell dans Evil Dead. Si le ton est globalement celui de la dérision (éclairage baroques, personnages de locataires décalés, superstitions religieuses), le film se frotte tout de même au thème de l'infanticide dans son dernier acte, tabou ultime que Stuart Gordon ne cherche pas à éviter.

Avec « Dance of dead », c'est au retour d'un Tobe Hooper énervé auquel nous assistons. Le film est en effet visuellement le plus radical de la série, usant d'un montage quasi hystérique, d'une bande-son agressive et de visions dépassant de très loin ce qu'on s'attendait à y trouver. Crémation de femmes nues hurlant de douleur, scènes de sexe explicites nécrophiles, fascination morbide pour un spectacle où des « zombies » exécutent une danse spasmodique à coup de décharges électriques, Tobe Hooper adopte un point totalement décomplexé sur une société post apocalyptique où chaque personnage a perdu toute notion de morale. De Peggy, qui tient un diner avec sa mère sur-protectrice, et qui devient petit à petit fascinée par le monde de ténèbres, à Jak, un dealer qui revend des poches de sang (le Rouge) prélevées sur les citoyens les plus vulnérables, c'est  une société en déliquescence, en perte de repère qu'il nous est donné d'observer. Chacun agit cependant par strict instinct de survie y compris la mère de Peggy dont on apprend le terrible secret lors du twist final, et qui pousse sa fille encore plus loin dans la vengeance et l'immoralité. Une conclusion  qui ne laisse aucun espoir sur la nature humaine, noire et pessimiste au possible.

Jenifer est sans doute l'un des épisodes de l'anthologie le plus dérangeant et inconfortable. Réalisé par Dario Argento, il met en scène la fascination d'un policier pour la jeune femme qu'il a sauvé d'une tentative de meurtre, Jenifer. Celle-ci est muette et défigurée, le visage figé dans un espèce de rictus obscène et a des yeux énormes d'animal apeuré. Une complicité sexuelle naît entre les deux personnages qui va provoquer la chute sociale et mentale de l'homme. Jenifer met le spectateur mal à l'aise à la faveur des nombreuses scènes de sexe où se mêle un sentiment de fascination – Jenifer est plastiquement superbe et dégage une forte tension sexuelle quasi animale – et de répulsion – le visage défiguré en une grimace grotesque. La jeune femme est caractérisée comme une bête obéissant aux instincts primaux de reproduction et d'alimentation (elle dévore d'abord un chat domestique puis les voisins du quartier) et d'une jalousie meurtrière envers quiconque se dresserait entre elle et son amant. Dans sa folie prédatrice, elle va jusqu'à attirer un jeune homme dans son antre pour lui dévorer l'entre jambe dans un festin  cannibale à peine suggéré. On le voit, Dario Argento va très loin et ne s'autorise quasiment aucune censure. Il entraîne le spectateur dans la folie progessive de son personnage avec qui l'identification est d'autant plus aisée que toute l'histoire nous est présentée de son point de vue de plus en plus dérangé, jusqu'au final qui boucle la boucle et augure d'une nouvelle victime des charmes vénéneux de Jenifer.

Chocolate commence avec l'aveu, face caméra, du meurtre que le personnage principal vient de perpétrer. Jamie, célibataire divorcé narre à la police les événements qui l'ont conduit à son geste. Cet épisode commence comme la chronique intimiste d'un homme qui tente de reconstruire sa vie après une séparation, mais dont le quotidien est très vite contaminée par des événements peu ordinaires, qui commence par un goût de chocolat inhabituel dans la bouche. Jamie est sujet à des visions tout d'abord très mystérieuses et inexplicables. Puis il devient évident que lors de ces altérations de la conscience, il se retrouve dans la peau d'une femme dont il tombe amoureux. C'est la partie la plus intéressante de cet épisode qui fait penser dans ses meilleures moments à David Lynch et à la « fugue psychogénique » de Lost Highway, dont l'humour n'est pas exclu lorsque Jamie découvre les plaisirs du sexe au féminin. L'idée d'utiliser le chocolat pour convoquer ces visions est excellente mais la suite n'est pas du même niveau. Dans son dernier acte, Chocolate échoue à nous surprendre quand Jamie cherche dans sa mémoire des indices qui pourront le conduire à cette femme. Sa rencontre avec elle devient excessivement bavarde et on sent bien que Mick Garris peine à conclure le récit. Le dernier tiers part en roue libre et ne nous offre hélas rien de plus que le meurtre annoncé dès le début. Dommage.

Homecoming est l'épisode le plus politique de la série, il occupe une place un peu particulière dans l'anthologie car le postulat fantastique n'est pas utilisé pour faire peur mais sert de prétexte à une charge virulente de l'administration Bush. Les victimes de la guerre en Irak rapatriés aux États-Unis reviennent à la vie non pas pour se nourrir de chair humaine mais pour participer au vote présidentiel ! Joe Dante brocarde avec un plaisir évident l'univers cynique de la politique, de l'armée  et des médias pour livrer une satire jubilatoire du contexte politique américain actuel.


La série « Masters of Horror » permet de se faire côtoyer les talents les plus récents du genre, mais aussi constitue une réelle opportunité de reprendre des nouvelles avec des réalisateurs ayant davantage officié dans les années quatre-vingt. C'est le cas de John  Landis qui réalise ici un « Deer Woman » inspiré d'une légende indienne : une femme-cerf séduit des hommes qu'elle tue ensuite à coup de sabots sauvages. L'inspecteur Dwight Farraday, spécialisé dans les attaques d'animaux est chargé d'enquêter sur une série de crimes qui pourraient être perpétrés par cette créature légendaire. John Landis adopte un ton distancié, voire parodique qu'il appose au récit. Il donne l'impression de ne pas croire une seule seconde à son scénario pour le tourner en pure dérision. Ainsi cette séquence de spéculation où l'inspecteur de police s'imagine la scène du meurtre dans des scénarios plus invraisemblables les uns que les autres.  La distanciation qu'il opère nuit cependant à l'intérêt du spectateur. La conduite de l'enquête et la résolution du récit ne semblent avoir aucune espèce d'importance. John Landis s'intéresse davantage à ses personnages et notamment aux seconds rôles et l'épisode permet les retrouvailles entre John Landis et Brian Benben, le Martin Tupper de la série culte « Dream On », où de nombreux inserts de séries B venaient illustrer les pensées du personnage principal. Le réalisateur témoignait alors d'une véritable déférence envers les films dont il empruntait le matériau pour l'intégrer dans sa fiction. Dommage que dans Deer Woman, il ne se serve plus du prétexte fantastique que pour tourner son sujet en dérision pure, son segment n'a pour ainsi dire pas sa place dans une telle anthologie.

Si un nom surgit spontanément à l'évocation du terme « Master of Horror », c'est bien celui de John Carpenter, tant il a marqué de son empreinte le genre du cinéma d'horreur et du fantastique, de The Thing à Christine, de Fog à  Prince des Ténèbres. Autant de chefs d'oeuvre inoubliables et intemporels qui ont marqué l'imaginaire des spectateurs et continuent d'effrayer les nouvelles générations qui les découvrent. Il apparaissait donc évident que le réalisateur participe à cette anthologie. Cependant, s'il fait autorité de façon incontestable dans le genre, l'épisode qu'il réalise pour la série, "Cigarette Burns", ne révolutionne pas la donne, même s'il se révèle ambitieux sur le fonds. La recherche de la bobine d'un film légendaire et maudit, « La fin absolue du monde » (en français dans le texte), permet à John Carpenter une réflexion sur son genre de prédilection, le cinéma d'horreur, et de son impact sur le public, d'un point de vue cinématographique, historique, sociologique, mythique. Il englobe ainsi les exploitants de salle spécialisées, les collectionneurs, les critiques, les « nerds » à la recherche du moindre morceau de pellicule d'un film d'Argento, mais aussi les réalisateurs de snuff movies. Cependant, l'évocation systématique de la « Fin absolue du monde », de la légende qui l'entoure (la projection du film a provoqué de scènes de barbarie lors d'un festival à Sitgès) finit très vite par désintéresser ou faire sourire malgré l'effet de contamination qu'il produit sur ceux qui tentent de s'en approcher (le fameux « cigarette burn », la brûlure de cigarette qui indique sur une pellicule la fin de la bobine, gagne ici la réalité pour provoquer des béances dans le réel et basculer dans la folie). Seuls quelques effets gores assez audacieux viennent saisir le spectateur à la gorge, in extremis. Au final, si Carpenter réalise un segment ambitieux sur le fonds, il se révèle néanmoins décevant sur la forme.

Si John  Carpenter était le nom qui s'imposait naturellement pour réaliser un épisode des « Masters of Horror », a contrario, celui de William Mallone ne fait pas force d'évidence. Sa biographie sur le site officiel de la série nous indique qu'il a réalisé quelques programmes télévisés, rien de plus glorieux à son palmarès. Pourtant, il faut avouer que la vision de « Fair haired child » permet  d'entrevoir un certain talent chez le bonhomme. Son épisode témoigne d'une maîtrise certaine des codes du genre, narratifs, dramaturgiques, plastiques, qui puise occasionnellement à la fois dans la littérature ((le thème de la noyade) et le cinéma gothique (les flash backs qui évoquent irrésistiblement Tim Burton et son imagerie). William Mallone distille habilement ses effets, maintient le mystère ce qu'il faut, dirige ses comédiens vers l'outrance et le surréalisme, utilise brillamment son décor et la musique dans son récit. Tour cela pour une relecture du monstre tragique, thème classique du genre qui trouve ici une belle illustration.

Dans « Pick me up », Larry Cohen ne tergiverse pas et rentre très vite dans le vif de son sujet, lointainement inspiré du film « Hitcher ». Il y est aussi question de psychopathe routier, mais l'originalité du propos est ici qu'il n'y en a pas qu'un seul mais deux. Le premier est un auto stoppeur au chapeau de cow-boy et l'autre un camionneur qui conduit un bahut transportant de la « viande pour chien », à savoir les corps de ses victimes et brandit une étoile de shériff pour tromper la vigilance des innocents ramassés sur le bord de la route. L'épisode installe rapidement une tension palpable à la faveur du jeu halluciné du camionneur, qui provoque un malaise évident. Larry Cohen utilise en outre des décors où le climat d'insécurité est renforcé, tels ces chambres d'un hôtel poisseux, ces bords de route noyé dans le brouillard ou la cabine d'un camion où pendent sous forme de trophée les affaires personnelles des précédentes victimes du tueur. Les deux psychopathes vont se livrer à un jeu du chat et de la souris autour d'une jeune femme qui fuit son passé et dont l'autocar est tombé en panne au bord de la route. Ils rivalisent de ruse pour être celui qui la tuera, comme deux prédateurs se disputant un territoire et une proie. Chacun a sa propre logique de prédation, des motifs qui s'opposent dans un duel sanglant au climax paroxystique où ils se voient in fine surpassés par plus fort qu'eux. Un final qui ne laisse aucun espoir à fréquenter ce bout de route où semblent roder tels des charognards tous les tueurs du coin...

Impossible de concevoir une anthologie de l'horreur sans rendre un hommage aux studios qui ont fait les heures glorieuses du genre, qu'il s'agisse de Universal ou de la Hammer. « Haekel's tale » est donc l 'épisode de la série sous l'influence de ses prestigieux aînés, et plus particulièrement de Frankenstein, cité explicitement dans le récit. John McNaughton emprunte tous les codes du genre, orages nocturnes, cimetierre brumeux, laboratoire aux expériences douteuses, profanateurs de sépultures, pour les mettre au service d'une histoire classique de résurrection.  Thème qui permet en outre d'aborder les sujets de la science, Dieu, la magie, l'amour au delà de la mort. Sauf que même si l'épisode baigne dans un climat victorien de bon aloi, nous ne sommes plus dans les années quarante  et la dernière partie de l'épisode, qui voit une orgie de sexe et de sang cannibale, nous rappelle sans hésiter que les « Masters of Horror » sont contemporains et surpassent en visions horrifiques celles davantage poétique de leurs modèles.

Rien de tel qu'un petit scandale pour faire la promotion d'une série. « Imprint » est le seul épisode a avoir été interdit d'antenne outre-Atlantique, même si nos amis grands britons l'ont tout de même diffusé. Il fallait bien un réalisateur sulfureux comme Takashi Miike pour outre-passer le cahier des charges très strict de la série qui interdisait notamment de représenter à l'écran toute forme de dégradation humaine. C'était sans doute trop en demander au réalisateur d' « Audition » qui manifeste une nouvelle fois son imagination sans borne dans les séquences de torture, ici à base d'épingles à cheveux sadiquement plantés sous les ongles ou dans les gencives, avec une cruauté qui n'est pas épargnée au spectateur. Ajoutez à cela la vision traumatique d'avortements clandestins à base de curretage ou d'accouchements de nourrissons malformés, et vous obtiendrez les raisons de la censure de ce segment. Hormis ces quelques joyeusetés, quoi se mettre sous la dent, me demanderez-vous ? Un récit sous forme orale où la vérité nous est dévoilée de façon successive dans une structure « à la Rashomon », dans un contexte de bordel japonais où les prostituées ont de lourds secrets à dissimuler. Un épisode certes choquant, mais dont justement la violence des visions proposées par le réalisateur ne semble être que le seul motif qui l'ont poussé à le mettre en scène.

Depuis la révélation « May » il y a deux ans, on attendait de pied ferme des nouvelles de son réalisateur, Lucky McKee et de sa magnifique interprète principale, Angela Bettis. « Sick girl » est justement l'occasion de ses retrouvailles qui confirment sans nul doute possible l'immense talent du bonhomme et de sa muse. Cet épisode est le meilleur de la série, rien de moins, et rivaliser de la sorte avec des maîtres incontestés tels que Dario Argento ou Tobe Hooper n'est pas un mince exploit. Tout comme dans May, Angela Bettis interprète une sorte de freak incapable de lier de liens sociaux avec quelqu'un d'autre que ses directs collègues de travail. Ici, elle joue une entomologiste, Ida Teeter, qui vit sa passion des insectes jusqu'à en faire une large collection dans son appartement, la condamnant à n'y inventer personne. Jusqu'au jour où elle tombe amoureuse d'une jeune femme partageant sa passion, Misty, mais dont la liaison va être contrariée par un spécimen un peu intrusif, qui va se servir de son amante pour y coloniser sa progéniture. Si May et Ida partagent des caractéristiques communes, Angela Bettis interprète ces deux personnages de façon diamétralement opposée : noire et inquiétante d'un côté, excessive et burlesque de l'autre. Il faut voir l'actrice parler à ses insectes ou feindre la maladresse pour se persuader de l'immense talent de son jeu. De la même façon, Lucky McKee brode une mise en scène opposée à celle de « May », sous influence « argentesque ». il flirte ici avec la comédie slapstick pour nous donner une forme de parabole sur l'amour lesbien et un plaidoyer en faveur des couples homosexuels à élever des enfants, certes décalé, mais terriblement jouissif. Une grande réussite qui conclut cette première saison de belle façon.

10 mars 2007

Lost - S03E01

(Attention : mini spoilers !)

Si l'on considère strictement l'érosion d'audience de la saison 2 aussi bien outre-Atlantique qu'en France, et les nombreux débats qui animent les forums dédiés, Lost est une série qui est loin de faire l'unanimité, passé sa période d'état de grâce justifiée par son pitch audacieux et novateur. Lost ne fait plus recette et a perdu de son aura aux yeux des admirateurs du début, qui reprochent au programme de reporter systématiquement les révélations tant attendues au profit des flash-backs sur les résidents de l'île. Ces reproches semblent cependant reposer sur un malentendu : la série est construite dès le départ pour se dérouler sur plusieurs saisons et les flash backs tant décriés font partie intégrante du show, la série s'intéressant prioritairement à ses personnages.

La fin de la saison 2 avait cependant accéléré la délivrance de révélations : on en apprenait davantage sur les causes du crash de l'avion, et le « season final » laissait présager une nouvelle orientation narrative, avec la captivité prévue de Jake, Sawyer et Kate et les motivations des Autres, a priori scientifiques (une expérience d'observation des réactions humaines en milieu hostile ?). La production avait d'ailleurs promis que la nouvelle saison se focaliserait davantage sur « les Autres » et leurs motivations, proposerait davantage d'aventure et que les six premiers épisodes constitueront une mini-série sur la captivité des trois personnages mentionnés ci-dessus. Les « Lost-addicts » attendaient donc de pied ferme le retour de la série, dont le premier épisode de la saison 3, diffusé le 4 octobre sur les networks américains a mis enfin un terme au suspens de l'entre-saison.


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La première séquence de cet épisode, intitulé « A tale of two cities », tétanise d'entrée le spectateur qui ne s'attendait pas à une entrée en matière à ce point percutante. Une femme évoluant dans le confort rassurant d'un pavillon de banlieue s'emploie à cuisiner des cookies puis reçoit ses amis dans le cadre d'un club de lecture. Survient ce que l'on soupçonne spontanément être un tremblement de terre. Tous les résidents sortent dans la rue, y compris Henry Gale, qui observe dans le ciel l'explosion du PacificAirlines 815 en provenance de Sydney !!! Il ordonne sans hésiter à Ethan et Goodwin de s'infiltrer dans les groupes de survivants tandis que s'écrasent l'avant de l'appareil et l'arrière du fuselage dans un grand plan d'ensemble où l'on découvre que les Autres vivent dans une vraie ville située sur l'île. Dans ces quelques minutes de pré générique, le spectateur enregistre d'emblée quelques informations essentielles : les Autres vivent sur l'île dans une communauté socialement et techniquement avancée et semblaient manifestement attendre le crash si l'on en croit la promptitude avec laquelle Henry Morgan donne les ordres à ses collègues, confirmant sans nul doute sa position de leader.

Alors, les plus hostiles à Lost diront sans doute que chaque saison a toujours bien commencé, s'est bien conclue, et que le reste n'est que ventre mou. La suite de l'épisode vient leur donner raison : on retrouve Jake, Kate et Sawyer en captivité faisant l'objet d'expériences, psychologiques, comportementales et médicales si l'on en croit les traces de piqûre sur les bras des personnages. Les flash back reprennent leur cours, centrés ici sur Jake à l'époque de son divorce. On n'apprend pas grand chose de plus, si ce n'est que les Autres disposent d'informations très précises sur leurs prisonniers. Finalement peu de choses si l'on considère l'attente suscitée par les mois d'attente qu'ont dûs subir les fans de la série. En fait, ce premier épisode s'impose comme une sorte de manifeste de la part des créateurs de Lost : les révélations seront toujours distillées au compte goutte et les flash back feront encore partie intégrante du show. En réalité, Lost demeurera toujours Lost, ses détracteurs continueront de critiquer la gestion du temps dans la série et paradoxalement, regarderont sans doute toujours ce programme qu'ils décrient tant ! Les vrais fans eux, se réjouiront du spectacle, où la révélation de l'information que tout le monde attend est sans cesse reportée, permettant les spéculations les plus invraisemblables, et où les flash back nous réservent encore de beaux moments d'émotion et nous permettent d'en apprendre davantage sur la psychologie des personnages.

Il faudra sans doute faire un point d'étape au terme du sixième épisode, avant le premier break annoncé de la diffusion aux Etats Unis, pour vérifier que la note d'intention délivrée à la faveur de ce premier épisode est respectée. Rendez-vous donc fin novembre pour le prochain bilan.

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10 mars 2007

Lost - Saison 2

La fin de la saison 1 de Lost  se terminait sur un double cfliffhanger aussi redoutable qu'imparable. Tandis que Sawyer, Jin et Michael voyaient leur échappée en voilier contrariée par une bande de pirates leur enlevant de surcroît Walt, sur l'île, Locke, Jack, Hugo et Kate faisaient exploser la fameuse trappe, objet de tous les fantasmes depuis la mi-saison. D'un strict point de vue de l'intrigue globale de la série, cette conclusion nous amenait à nous interroger sur la capacité des scénaristes à conserver un même niveau de mystère et de suspens tout en levant le voile sur les questions que se posent les téléspectateurs.

Dès les premières images, l'attente est enfin récompensée : la saison 2 livre d'entrée de nouvelles clés en révélant d'abord le contenu de la trappe et d'autre part en introduisant de nouveaux personnages : le groupe de survivants de la queue de l'avion qui se cache de locataires plus anciens de l'île, les « Autres », dont l'identité constitue un nouvel enjeu de la série. Ces nouvelles pistes scénaristiques permettent aux scénaristes de broder de nouveaux motifs et surtout, d'éviter la répétition par rapport aux théories de la première saison. Exit donc l'hypothèse d'une sorte de purgatoire où les personnages devraient régler leurs comptes avec leur passé avant d'accéder à un monde meilleur. Disqualifiée également le postulat strictement science-fictionnel, où la créature invisible et l'ours polaire seraient des projections psychiques des personnages. La saison 2 de Lost fait tomber nos plus belles certitudes en s'orientant vers le thème de l'expérience psychologique, à la manière d'un vaste « Truman Show » sous les cocotiers.  De ce point de vue, Lost est une série qui va bien au-delà de ce qu'on pourrait attendre d'un simple programme télé de divertissement en s'intéressant à des théories diverses telles que celles du « Contrat Social » de Rousseau, du behaviorisme,du bouddhisme ou du déterminisme. Les indices sont là, parfois tellement manifestes que le spectateur tourne autour sans s'en saisir. Mais pour qui s'empare de ces propositions, le champs de la réflexion est vaste et passionnant, au delà du  plaisir instantané que la série procure. Il suffit de voir le nombre de forums qui lui sont consacrée pour se convaincre de l'impact qu'elle produit et de  l'excitation intellectuelle qui en est la conséquence.


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Bien sûr, Lost n'en oublie pas de développer ses personnages, à la faveur des fameux flash backs qui révèlent certains aspects de la personnalité des naufragés. Leur comportement sur l'île est systématiquement dévoilé par un épisode de leur passé. Ainsi la ruse de Sawyer pour récupérer toutes les armes de l'île s'explique par ses antécédents d'arnaqueur professionnel, la disposition de Jack de vouloir sauver le monde trouve son origine dans son métier de chirurgien, l'addiction de Charlie remonte à ses relations avec son frère. Et ainsi de suite. Ceux qui reprochent à ces flash backs de ralentir l'intrigue principale n'ont tout simplement pas compris qu'il sont partie prenante du dessein général, que Lost s'intéresse avant tout aux individus échoués sur l'île pour dresser de magnifiques portraits qui dessinent une forme d'anthologie de la série télé, chaque flash back empruntant à un genre particulier, du fantastique au policier, du soap au drame psychologique.

Cette seconde saison , si elle met à mal nos principales certitudes, confirme cependant son inscription directe dans un contexte post 11 septembre et la construction d'une société marqué par cet événement fondateur. En effet, la construction d'une forme de société sur l'île par les survivants se heurte à la peur de l'autre (les « Autres », spontanément identifiés comme les méchants alors qu'eux se définissent comme les gentils), à la notion de territoire (la ligne à ne pas dépasser pour éviter le conflit), de collectivité, d'utilisation des armes à feu (toujours objet de  drames ou de commerce entre les personnages), de leader.  Si la théorie globale vers laquelle semble se diriger la série peut encore être remise en question, il ne fait cependant pas de doute que Lost se veut le territoire d'observation des comportements individuels et collectifs qui ont suivi les attaques du 11 septembre 2001.

Si Lost continue sur ce rythme-là, parvient aussi intelligemment à lever nos interrogations tout en posant de nouvelles questions, et sait surtout s'arrêter au bon moment, il est évident que cette série deviendra l'un des programme les plus ambitieux et réussi que l'on aura vu sur le petit, voire même sur le grand écran ces dernières années. C'est tout ce que l'on souhaite, en attendant de pied ferme le 4 octobre 2006, date de diffusion du premier épisode de la troisième saison qui devrait nous réserver beaucoup de surprises.

10 mars 2007

Lost - Saison 1

Ne tournons pas autour du pot : Lost mérite amplement le succès international qu'il a connu en 2005 partout où il a été diffusé. Évacuons d'entrée les quelques menus défauts pour nous concentrer plus tard sur les multiples qualités de ce programme.

Parmi ce qui fâche a priori, le sentiment spontané d'avoir à faire à une série qui concède beaucoup au politiquement correct, avec sa galerie de personnages d'origines ethniques et sociales différentes : parmi les survivants de ce  crash aérien échoués sur une île mystérieuse, on retrouve ainsi un noir, deux coréens, un arabe, un obèse et un handicapé. On pense a priori au calcul trop manifeste pour être parfaitement honnête, d'autant plus que la majorité des personnages pourrait figurer dans une revue de mode : yeux bleus, bien charpenté(e)s, belles gueules portant bien  la barbe de trois jours et le marcel. Cependant, et heureusement pour la réussite de la série, il ne faut pas s'arrêter à ces détails d'ordre esthétique et "politique". Lost va bien au-delà des apparences, joue constamment sur les faux semblants, creuse la surface pour explorer l'ombre et les secrets de chacun.

Le sentiment que Lost est un programme hors du commun s'impose dès le pilote et sa séquence inaugural traumatique, digne d'une production pour le grand écran. Un homme allongé se réveille dans la jungle, rejoint une plage où gît un morceau de fuselage d'avion déchiqueté. Les survivants du crash aérien qui vient de se produire courent dans tous les sens, hurlent. Un passager rescapé est littéralement happé par le moteur qui explose. A la faveur d'une mise en scène chaotique et d'une bande son oppressante (cris des survivants, bruit sourd des réacteurs), l'atterrissage ne se fait en douceur ni pour les personnages, ni pour le spectateur.


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La série repose sur trois ressorts scénaristiques qui permettent de maintenir constamment l'intérêt du spectateur : l'organisation des rescapés et l'interaction des personnages entre eux (l'aspect
Kho Lanta du programme), le mystère de l'île et les secrets qu'elle semble receler (une forme invisible hostile se manifeste rapidement), et les flash backs sur le passé des principaux protagonistes.  Chaque épisode se focalise en effet sur un personnage particulier et son passé avant le crash. Il y a Jack, le médecin qui n'a pas tout à fait réglé ses comptes avec son père, Locke, ancien paralytique en quête d'aventure, Kate, fuyarde poursuivie par la police pour d'obscures raisons, Sawyer, arnaqueur de talent et de circonstance qui cherche à se venger de celui responsable de la mort de ses parents, le couple coréen Sun/ Jin, empêtré dans les traditions et les accointances mafieuses du père de la jeune fille, Hugo, gagnant d'un loto « maudit », Boone et Shanon, frère et soeur aux relations troubles, Sayid, ancien soldat de la garde républicaine irakienne en quête de rédemption, Charlie, rocker accro à la came et la foi et Michael, qui vient d'obtenir la responsabilité légale de son fils de 11 ans, Walt. Les histoires personnelles de chacun de ses personnages dessinent systématiquement des motifs ayant à voir avec le pardon, la rédemption, la foi, et font écho avec les événements se déroulant sur l'île, de telle façon qu'il est permis de supposer que leur présence sur celle-ci n'est pas fortuite et que cette expérience de naufragé est une épreuve, le moyen pour chacun de régler ses comptes avec le passé. La richesse de la série provient donc à la fois de son pitch astucieux, mais surtout de la qualité de la caractérisation de chaque personnage, dont aucun n'est absolument unilatéral (a contrario de ceux de Desperate Housewives qui sont prisonniers de stéréotypes). Ainsi, le salaud le plus manifeste va révéler ses failles intimes, tandis qu'un autre dont on ne soupçonne pas le passé s'avère être un criminel en fuite. Les plus hostiles à la série diront que ces retournements de situations sont aussi un procédé, ainsi que le gimmick de l'oeil qui s'ouvre au début de chaque épisode, en tout cas, il faut avouer que cette multitude d'histoires personnelles et intimes tantôt réservent de grands moments d'émotion (la découverte du passé de Locke, la scène de l'aéroport où Sun décide de rester avec son mari), tantôt flirtent avec le fantastique à la manière des meilleurs épisodes de la Quatrième Dimension (les chiffres maudits d'Hugo, la vision du médium qui anticipe la catastrophe aérienne). Il faut aussi souligner la qualité de l'interprétation dont on peut toutefois mesurer l'hétérogénéité. Si les deux personnages principaux, Jack et Kate nous paraissent cabotiner chacun dans leur registre, on apprécie davantage le jeu d'Hugo, de Locke ou de Sun, auquel on doit les plus beaux moments d'émotion de la série.


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L'aspect fantastique de la série et le mystère qui règne sur l'île ont bien sûr contribué à son succès. La présence invisible et inquiétante, très tôt révélée dans le programme est l'objet de toutes les conjonctures de la part du spectateur qui a tout loisir de l'interpréter à sa manière, en fonction de la  multitude d'indices disséminés ça et là par des scénaristes malicieux. On peut ainsi se demander alternativement si cette île n'est pas une forme de purgatoire où les naufragés, tous morts, doivent subirent des épreuves pour accéder à une autre étape. Ces apparitions invisibles ne sont-elles pas le fruit de la conscience de chacun, la matérialisation de leurs peurs les plus profondes, comme semble le suggérer l'apparition d'un ours blanc tout droit issu de la bande dessinée que feuillette régulièrement Walt. Quelle est l'importance de cet adolescent dans la série, au regard du dernier épisode qui laisse supposer qu'il joue un rôle manifeste dans ces événements ? Faut-il porter du crédit à l'attention accordée aux chiffres dans la série ?  Aucune réponse n'est évidemment apportée à tous ces questionnements légitimes, le scénario adoptant un strict équilibre entre la délivrance d'indice adressés au spectateur et un mystère qui reste de toute façon nébuleux et sur lequel il ne revient pas de façon trop systématique pour ne pas mettre notre patience à l'épreuve, au contraire d'une série comme Carnivàle, dont le secret, relancé trop systématiquement, finissait au final par désintéresser complètement, atteignant l'effet inverse à celui escompté.


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Ce sera le grand enjeu de Lost sur la durée : son cliffhanger, absolument redoutable, nous laisse dans une attente insoutenable de la suite. Par contre, il faudra bien que le programme lève le voile sur ses secrets, tout en continuant à nous captiver de la même façon que cette première saison. Un véritable défi pour les scénaristes, et un espoir démesuré pour le spectateur.

10 mars 2007

Heroes - S01E01

Dans l'immense offre de nouvelles séries prévues pour la rentrée télé U.S., « Heroes » était sans doute la plus attendue. Un pitch excitant qui avait de quoi faire saliver les nerds avides de comics et un teaser qui promettait un show de haut niveau. Le pilote a confirmé très vite les espoirs placés dans ce programme : « Heroes » a tout pour devenir le futur chouchou des spectateurs nourris à « Lost » ou « Prison Break », dispose d'un potentiel suffisant pour écraser la concurrence.


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« Récemment, il s'est avéré qu'un certain nombre d'individus aurait ce que l'on peut appeler des capacités hors du commun. Et bien qu'ils ne le savent pas encore, ils vont non seulement devoir sauver le monde, mais aussi le changer à jamais. Ce passage de l'ordinaire à l'extraordinaire ne se fera pas sans heurt. Toute histoire a un commencement. La première partie de leur incroyable épopée commence ici ». Le texte qui défile pré-générique permet de situer d'entrée les enjeux du show : la découverte par des individus aux quatres coins du monde, de leurs super pouvoirs et la façon de ils vont devoir les utiliser pour empêcher un péril qui reste encore à définir. Dans ce premier épisode, nous faisons ainsi la connaissance de Peter, qui fait le rêve récurrent qu'il est capable de voler. Nikki, une jeune lycéenne découvre qu'elle est indestrucible, même en soumettant son corps à des chutes mortelles ou à l'épreuve du feu. Isaac a le don d'anticiper les pires catastrophes (déraillement d'un train, attentat meurtrier) et en fait des peintures en état de transe. Hiro, jeune japonais amateur de science fiction, peut modifier la courbe du temps et ainsi se téléporter par la seule force de la pensée. Claire est une mère isolée qui vit de strip teases vidéos sur le net et qui découvre qu'elle dispose d'un double maléfique qu'elle aperçoit ponctuellement dans le reflet d'un miroir. Le personnage qui va permettre à tous ces super-héros en devenir de se rencontrer est Suresh, le fils d'un généticien qui reprend les travaux de son père sur les capacités hors normes dont disposent certains individus.

La force du pilote est de proposer une mise en scène adulte, qui évite le positionnement « teenage » d'un « Smallville » pour se situer davantage dans la lignée d'un film comme « Incassable ». Soit la promesse d'une approche riche et intelligente de la mythologie du super héros, de la difficulté de supporter la responsabilité de telles capacités, d'accepter sa différence, de trouver un sens à son existence en la circonstance. La série cite d'ailleurs explicitement « X Men » dont elle s'inspire aussi manifestement.  En 52 minutes, « Heroes » pose les bases d'un univers complexe, avec une caractérisation des personnages assez fouillée où chacun dispose d'un back ground signifiant qui donne beaucoup de consistance à l'intrigue. Si la série parvient à soutenir cette approche mature d'un tel sujet, sans que nos héros n'aient besoin d'enfiler une paire de collants ou une cape pour voler au secours du monde, alors le pari sera pleinement tenu. « Heroes » propose déjà dans son pilote de vrais grands moments de mise en scène comme cette éclipse qui unit en un même événement tous les personnages qui s'ignorent encore, ou la téléportation de Hiro d'une rame de métro de Tokyo au Time Square de New York. On espère très fort que la suite nous réserve d'autres moments de ce type. Si « Heroes » y parvient, nul doute que cette série s'annonce comme un must du petit écran, un rendez-vous incontournable dont on attend déjà la suite.

10 mars 2007

Desperate Housewives, saison 1

18415460Véritable buzz télévisuel de 2005 (carton d'audience outre-Atlantique,  présence des actrices dans les rubriques people de la presse, récompenses en pagaille), Desperate Housewives est arrivé chez nous précédé d'un plan media annonçant rien de moi que la révolution de la série télé,  l'enterrement en règle du soap opéra, la nouvelle norme de qualité en la matière. « Vous allez voir ce que vous allez voir...! » nous disait – on...

Si la période est effectivement très faste pour les séries télé ces temps-ci (les Sopranos, 24, West Wing, Six Feet under pour ne citer que les meilleures), on ne peux qu'adopter un comportement de méfiance légitime lorsque tous les superlatifs sont prononcés autour du même programme. Concernant Desperate Housewives, on ne s'était pas trompé : la série déçoit.

L'histoire commence avec le suicide d'une mère de famille habitant le quartier résidentiel de Wisteria Lane. Ce geste inexpliqué fournit le prétexte à une forme d'étude des moeurs autour des résidants de ce quartier et à une intrigue « policière » sur les raisons qui ont poussé cette femme a priori sans histoire à commettre l'irréparable. Car le credo de la série est bien le suivant : au delà des apparences et de la représentation sociale, chacun a des secrets cachés, que le scénario se propose de découvrir et de mettre à jour. Le postulat de départ est séduisant, la voix off de la défunte, emprunté au Mankiewicz de « Chaînes Conjugales » ou au Billy Wilder de « Sunset Boulevard » place la série sous  de prestigieuses références. Hélas, Desperate Housewives échoue très vite à tenir ses promesses.

La caractérisation des personnages est l'aspect le plus problématique du programme. L'histoire s'intéresse à quatre amies chacune stéréotypée à outrance et immédiatement prisonnière d'un cliché qui autorise tous les lieux communs qui y sont associés. Susan est une jeune divorcée qui vit avec sa fille adolescente et manifeste une maladresse systématique, attire les catastrophes les plus invraissemblables. Lynette est la mère de quatre enfants hyper actifs (ils se servent de casseroles comme de percussions, jouent au hockey dans le salon) qui consacre sa vie à son foyer et son mari après avoir travaillé avec succès dans la publicité. Bree est le modèle de la femme d'intérieure, psycho rigide, maniaque au stade le plus élevée (elle prépare chaque soir un repas qui relève davantage du réveillon que de la simple collation, termine d'astiquer l'argenterie alors qu'elle apprend les nouvelles les plus terribles, finit de faire le lit quand il s'agirait de conduire son mari mourant à l'hôpital). Gabriel, enfin, ancienne mannequin mariée pour l'argent à un riche entrepreneur qu'elle trompe avec son jardinier. Vénale à l'excès, elle est capable de tout pour  satisfaire sa fièvre dépensière.   On peut le constater, aucun lieu commun ne nous est épargné et jamais le programme prévu par les scénaristes ne dévie d'un pouce pour se laisser contaminer par l'émotion ou la surprise.  La série n'est certes pas dépourvue de rebondissement, mais ils sont à ce point systématisés qu'ils en deviennent banals pour ne plus intéresser le spectateur. Pire, certaines sous intrigues  sont ponctuellement mises à l'écart pour ressurgir et trouver leur résolution  à la faveur d'un twist qui contredit a posteriori l'intérêt qu'elle avaient plus tôt dans l'histoire. Par exemple : (début de spoiler) lorsque la mère de Carlos vient espionner Gabriel pour découvrir son adultère et qu'elle parvient enfin à ses fins, elle est renversée en voiture par  le fils de Bree qui trouvera la protection de sa mère. Mama Solis, plongée dans le coma, se réveille au bout de plusieurs semaines et avant d'avoir pu dire la vérité à son fils, décède dans une chute à l'hôpital. Cette suite d'événements est caractéristique de la construction scénaristique de la série : une sous intrigue qui se déroule sur plusieurs épisodes (l'enquête de Mama Solis pour découvrir le mensonge de sa belle fille), désamorcée pour un rebondissement qui suspend provisoirement les événements (le coma) pour se conclure à l'occasion d'une circonstance comique (la chute de Mama Solis dans les escaliers de l'hôpital) qui remet en jeu l'intérêt de ce qui précède. (Fin du spoiler). La multiplicité des pistes voulues par les scénaristes trouvent donc leur limite dans la difficulté de résolutions de celles-ci. En outre, le rythme systématique de comédie appliquée à la série, la voix off qui observe les événements depuis l'au-delà sur un ton de constante dérision ne s'adapte pas aux épisodes les moins drôles, et finit par nuire  à l'ensemble.  Car si Desperate housewives envisageait de gratter le verni des conventions pour révéler les pires secrets de ses personnages, elle ne fait en fait que poser un regard par le trou de la serrure pour n'observer finalement que des comportements de mensonges, d'adultère, de préférences sexuelles déviantes, de rivalités amoureuses, de déception de coeur qui ne la distingue pas de n'importe quel soap. La simple évocation de l'homosexualité ou de préférences sado masochistes a peut être quelque chose de transgressif outre-Atlantique, elle ne provoquera chez nous qu'un intérêt relatif ou poli, d'autant plus que l'intrigue policière autour du suicide et des secrets relatifs ne suffisent pas à maintenir l'attention du spectateur, ne passionne jamais.

Pour toutes ces raisons, Desperate Housewives échoue donc à nous captiver dès sa mi-saison malgré les notes d'intention de son créateur, Marc Cherry qui a essuyé le refus de la chaîne cryptée HBO à laquelle il avait dans un premier temps proposé le concept de la série. « Sans doute  ma série ne comportait pas assez de grossièretés » l'a-t-on entendu dire en interview. Cette simple phrase résume dans le même temps la confiance démesurée de celui-ci pour une idée qui ne différencie en rien sa création du tout venant de la production ordinaire et sa totale incompréhension face à ce qui qui fait l'absolue réussite artistique de ses concurrents (Six Feet Under, Sopranos).

A vouloir se croire plus malin que tout le monde, on finit par perdre toute mesure et perspective : Desperate Housewives est une série agréable mais devant laquelle on a sérieusement l'impression de perdre son temps D'ailleurs, l'illusion n'aura tenu qu'un temps : la deuxième saison diffusée actuellement sur les networks américains accuse un sérieux tassement de ses chiffres d'audience.

10 mars 2007

24 heures chrono, saison 4

Présentée très tôt avant sa diffusion comme la saison des changements, cette quatrième journée de "24 heures chrono", malgré un renouvellement quasi complet de son casting, revient très vite dans la droite lignée des saisons précédentes, pour offrir au téléspectateur un programme conforme à ce qu'il attend.

Premier motif de réjouissance : le départ de Kim Bauer, dont les scénaristes avaient épuisé la liste des péripéties envisageables au cours des trois saisons précédentes. Du côté des nouvelles têtes, font leur apparition à la CTU : Erin Driscoll, nouvelle directrice dont la sous intrigue avec sa fille malade est la plus faible de la saison et ne fait que préparer son départ vers la sortie, Curtis Manning, agent de terrain qui remplace Tony Almeida, et Edgard Stiles, expert en informatique d'abord coincé et peu confiant en lui, qui va progressivement gagner en assurance et en sûreté.


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Au début de cette nouvelle saison, Jack Bauer travaille pour le secrétaire d'état à la défense, Richard Heller, et a une liaison avec sa fille, Audrey Raynes, qui sort d'un  mariage malheureux. Dès le second épisode, l'enlèvement du père et de sa fille oriente l'intrigue vers des enjeux dramatiques personnels proches de la saison 1 et du kidnapping de la femme et de la fille de jack Bauer. Toutefois, si le spectateur s'imagine que le dispositif de cette quatrième saison s'articule uniquement autour  du sauvetage de Heller et de Audrey, il serait très loin du compte. Jack Bauer, très vite revenu sur le terrain (il n'allait tout de même pas faire carrière comme gratte papier !) va devoir déjouer un nombre considérable de menaces fomentées par un groupe d'extrêmistes islamistes. Dans un premier temps axé sur le terrorisme  informatique (les terroriste piratent le réseau internet pour diffuser le procès du secrétaire d'état à la défense, jugé pour les crimes des Etats Unis contre le peuple musulman), cette saison s'oriente ensuite vers la menace nucléaire, puis celle d'un attentat visant le président des Etats unis, pour s'achever sur le risque d'un  missile lancé sur une métropole américaine. On le voit, les scénaristes n'ont pas lésiné sur les événements, réservant un suspense quasi permanent au sein d'un dispositif désormais familier : split screen, actions simultannées, rappel régulier de l'horloge, la série procure toujours sa dose d'adrénaline. Le moteur de l'action est aussi largement assimilé par le téléspectateur régulier : prises d'otages, exfiltrations, taupes infiltrées, utilisation quasi permanente du cellullaire, cette nouvelle saison propose cependant  un contexte d'événements inhabituel avec un épisode de guérilla urbaine qui fait penser à John Carpenter et son Assaut.

La force de la série, outre son suspens addictif, est de ne jamais sacrifier les personnages à l'action et à réussir à les caractériser de façon très précise malgré la multiplicité des événements. Ainsi, la famille dormante turque, activée pour faire aboutir le projet terroriste, échappe à la caricature et à la simplification. Contre un père aveuglé par le dessein religieux, se dresse un fils, Berruz, parfaitement assimilé à la culture américaine et qui ne comprend pas le fanatisme  de sa famille. Il obtiendra toutefois le soutien de sa mère, tiraillée entre l'action terroriste et l'amour qu'elle porte à son fils.

Mais dans cette saison, c'est le couple Jack/ Audrey  qui est l'objet principal de l'histoire. En effet, leur relation va passer du beau fixe à la rupture, au fur et à mesure qu'Audrey découvre un Jack Bauer dont elle ignorait une facette, celle de l'agent prêt à tout pour servir son pays, y compris torturer et sacrifié son ex mari, soupçonné de complicité avec l'ennemi. De nouveau marginalisé, seul, Jack Bauer s'impose comme une figure tragique incapable de se lier personnellement et émotionellement alors que les exigences de son métier le poussent à manifester ses instincts de tueur les plus barbares.



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L'image finale d'un Kiefer  Sutherland, sac en bandoulière, officiellement mort pour ses proches  et la nation et marchant vers une nouvelle vie d'anonyme, promet cette fois une cinquième saison  dont on imagine qu'elle sera celle de la rupture. Réponse en janvier prochain sur les networks américains.

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